Daniel Luque, lidiant un toro n°59 de Domingo Hernandez, à Nîmes le 18 septembre 2021. ©JYB
C’est bien entendu un des secrets les mieux gardés du mundillo taurin. Les seuls indices que l’on peut obtenir portent sur les tarifs syndicaux négociés par les syndicats de professionnels et publiés au journal officiel du Royaume d’Espagne.
Mais auparavant distinguons quelques données :
En fonction du nombre de corridas qu’ils ont toréé l’année précédente, les toreros sont classés en 3 groupes : le groupe A comprend tous les toreros ayant participé à au moins 37 corridas, le groupe B ceux ayant officié entre 13 et 36 corridas, le groupe C tous les autres.
Il faut ajouter que les toreros du groupe A doivent avoir une cuadrilla permanente complète ; ceux du groupe B 1 picador et 1 banderillero au minimum. Les autres font appel aux picadors et banderilleros disponibles, même si beaucoup d’entre eux tournent avec 1 ou 2 d’entre eux toujours les mêmes lors de chaque corrida.
Revenons aux salaires : ils dépendent aussi de la catégorie de l’arène : elle dépend de la notoriété, de l’importance de la ville où elle se situe et du nombre de places disponibles. En France, les arènes de première catégorie sont Arles, Bayonne, Béziers, Dax, Mont-de-Marsan, Nîmes et Vic-Fezensac. Céret est en deuxième catégorie. Toutes les autres arènes sont en 3 ème catégorie.
Enfin, le salaire dépend de la notoriété du torero et de son pouvoir d’attraction sur les spectateurs : en 2022, Morante de la Puebla va surement être payé bien plus que le minimum syndical. D’autres dont le pouvoir baisse devront réduire leurs prétentions. Les alternatives sont le plus souvent payées au tarif syndical, de même que les premières prestations des jeunes toreros, sauf dans leur ville natale où ils peuvent attirer le public. Les apoderados savent jouer sur tous les tableaux pour mener à bien une négociation difficile dans leur intérêt et celui du matador.
Dernier critère, logique, le nombre de taureaux que le maestro devra affronter : exceptionnellement 1, normalement 2, mais 3 dans le cas d’un mano a mano, 6 dans le cas d’une encerrona.
Donc impossible de savoir ce qu’il en sera réellement. En fait, il vaudrait mieux parler de coût d’un torero plutôt que de salaire. Car la somme qui est versée à son apoderado, véritable dirigeant d’une petite entreprise, comprend 3 parties : le salaire de la cuadrilla qui est à la charge du torero ; les frais généraux, transport, hébergement, repas, frais divers et surtout le pourcentage de l’apoderado qui va de 7% pour les plus généreux à 15% pour les plus exigeants ! Enfin, les honoraires du torero proprement dits. C’est ce que présente le tableau ci-dessous extrait du JO 2020, qui ne présente que les chiffres d’une corrida à 3 toreros, donc 2 toros pour chacun.
Catégorie de plaza | Cuadrilla | Frais généraux | Honoraires | Total minimum |
GROUPE A | ||||
1 ère catégorie | 8 978 | 6 440 | 5 690 | 21 107 |
2 ème catégorie | 8 580 | 6 190 | 4 625 | 19 395 |
3 ème catégorie | 8 265 | 6 190 | 3 335 | 17 790 |
4 ème catégorie | 7 954 | 6 190 | 2 529 | 16 673 |
GROUPE B | ||||
1 ère catégorie | 7 037 | 3 570 | 5 267 | 15 873 |
2 ème catégorie | 6 404 | 3 570 | 4 284 | 14 258 |
3 ème catégorie | 5 457 | 3 468 | 3 087 | 12 012 |
4 ème catégorie | 4 892 | 3 468 | 2 345 | 10 705 |
GROUPE C | ||||
1 ère catégorie | 7 037 | 3 503 | 3 746 | 14 286 |
2 ème catégorie | 6 404 | 3 488 | 3 042 | 12 934 |
3ème catégorie | 5 457 | 3 427 | 1 951 | 10 834 |
4 ème catégorie | 4 892 | 3 427 | 1 550 | 9869 |
D’autres détails pourront être fournis par le lien :
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Ces chiffres montrent que pour risquer leur vie, les toreros qui ne sont pas des vedettes ne touchent pas une somme impressionnante !
Toujours est-il que si le salaire minimum est celui affiché ici, pratiqué dans beaucoup de petites arènes par les organisateurs le plus souvent bénévoles, on sait par exemple que José Tomas lorsqu’il s’est présenté à Nîmes le 16 septembre 2012 a exigé la totalité de la recette du jour, soit plusieurs centaines de milliers d’Euros! Et Simon Casas a accepté, à la fois par aficion et pour être le premier à faire revenir José Tomas aux arènes après sa blessure gravissime d’Aguascalientes, mais aussi parce qu’il savait, compte tenu de l’explosion d’enthousiasme et de la demande qui allait avec, il allait vendre pour l’ensemble de la féria 2 ou 3 fois plus d’abonnements qu’une année normale. C’est d’ailleurs ce que l’on a constaté à Jaen, cette semaine pour le nouveau retour de Jose Tomas.
Les autres figures du toréo ne sont pas en reste et certains ont avoué qu’ils vivraient très bien avec seulement 4 ou 5 contrats dans des arènes de première catégorie. Mais bien entendu, pour conserver son statut, il faut combattre et triompher au moins 37 fois dans l’année !
Intéressant cette analyse! Merci de donner une idée de la valeur accordée aux toréros!
J’ai toujours considéré la corrida comme un ballet. J’ai assisté à quelques corridas dans ma jeunesse, à l’époque où mes parents et moi passions nos vacances à Zarauz sur la côte basque espagnole. La vedette à l’époque était Miguel Dominguin, époque où les taureaux pesaient presque 200 kilos de moins qu’aujourd’hui. Considérant la beauté du spectacle, les risques encourus par les toreros et leur carrière courte, je suis stupéfait par le salaire alloué à ceux-ci, bien inférieur à ceux des footballeurs.
Très juste. Cependant, il faut considérer que les salaires des toreros sont négociés par les apoderados. Sans aller jusqu’aux sommets payés aux figuras, les toreros pouvant officier dans les arènes de première ou de seconde catégorie peuvent gagner plus que ces minima syndicaux.