Cobradiezmos, l’un des rares toros qui aient vraiment mérité l’indulto, est mort il y a quelques jours, encorné par les autres sementales de la ganaderia de Victorino Martin. Après taxidermie, il devrait reposer au musée de la Maestranza de Séville où il fut gracié en luttant devant Manuel Escribano, le 13 avril 2016.
Ce fut un grand toro et un moment d’une intense émotion. Voici les notes prises le soir même à l’issue de la corrida:
La grâce de Cobradiezmos est la 8 ème à laquelle j’assiste (y compris l’indulto en rejon à Nîmes en 2015!) et elle ne ressemble pas aux autres:
Jusqu’ici, j’avais vu des toros ménagés à la pique sur ordre du maestro pour préparer un 3 ème tiers brillant. Cela concerne aussi Arrojado gracié à Séville en 2011 par Manzanares (et lui aussi tué dans une pellea avec les autres sementales de son élevage).
Pour Cobradiezmos, j’ai vu 2 piques bien poussées et tenues par le piquero. La seconde est un peu trasera et sera relevée alors que le toro pousse toujours, mais la bravoure de l’animal est évidente et incontestable, d’autant qu’il part de loin au cheval.
A la cape, après la porta gayola d’Escribano, Cobradiezmos avait chargé avec ardeur, vivacité et en mettant la tête, permettant de jolies véroniques. Il se retourne vite et Escribano sent déjà qu’il devra maîtriser sa charge.
Après la pique, Morenito de Aranda lui donnera un joli quite par delantales.
Les banderilles sont posées par le maestro et le toro continue à embister avec agressivité. Le quiebro aux barrières assis sur l’estribo bénéficie de l’aide d’un banderillero, sans doute une conséquence de l’accident d’il y a 2 ans: là aussi, le toro suit bien le leurre.
L’entame de faena est logiquement en doblones pour maîtriser cette charge vibrante : l’embestida est profonde et pleine de classe.
Le toro affiche une noblesse qu’on ne voit que rarement chez Victorino: il charge museau au sol en partant de loin.
Les séries suivantes sont données mains basses voire très basses: il faut canaliser cette vraie machine à charger, le résultat est impressionnant et réjouissant!
Cobradiezmos se montre aussi bon à gauche qu’à droite: sur mon calepin je note les séries TB ce qui est mon maximum.
Escribano se montre presque à la hauteur de cette machine à charger. Il y aura quelques scories dans sa faena. Mais qui aurait pu faire mieux devant Cobradiezmos?
Je suis d’accord avec Marc Lavie: « Comment ralentir un tel torrent? L’endiguer était déjà une performance. »
Il y aura même un désarmé, le toro ayant marché sur la muleta laissée trop basse devant son museau. C’est d’ailleurs ce que disait en substance Victorino il y a quelques années lors d’une visite de son élevage: « mes toros, il faut toujours leur laisser la muleta sous les yeux: c’est la méthode pour les toréer et dans ce cas, ils répondent ».
On remarque sur quelques photos ce qui n’était pas apparu pendant la faena: des fléchissements et même une chute. Mon impression est que Cobradiezmos était plus emporté par son élan que victime de faiblesse: la vitesse à laquelle il se relevait et se remettait à charger incite à cette conclusion.
Au total, un indulto mérité. Pratiquement le seul des 8 auxquels j’avais assisté à la date de cet événement.
Heureusement Cobradiezmos a eu des descendant(e)s à qui il a transmis sa caste, sa bravoure et sa noblesse. Certains ont déjà reçu les honneurs de la vuelta al ruedo. Puisse l’un d’entre eux devenir à son tour un semental dont les fils nous fourniront d’aussi belles émotions!
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