CERET LA SURPRISE DU RETOUR DANS LE PASSE
Avinagrado, n°56 de Reta de casta navarra, lidié à Céret le 17 juillet 2021. ©JYB
Qu’ils étaient beaux ces toros de Reta ! L’éleveur prétend qu’ils n’atteignent le trapio « normal » pour des arènes comme Céret, qu’à l’âge de 5 ans. Car la Caste navarraise, originaire des montagnes, est naturellement plus petite et impressionne moins à un âge plus jeune.
Mais quel comportement étrange ! Charge violente à la sortie du toril.
Aux piques, la fuite à la moindre piqûre sur le cuir : d’ailleurs 3 d’entre eux seront condamnés aux banderilles noires de châtiment et peut-être un ou deux autres auraient pu l’être mais je ne sais s’il restait des banderilles noires en stock.
A Céret, la tradition est qu’il n’y ait qu’un seul cheval de pique en piste. Or dès le premier, Israël de Pedro, le picador de Sanchez Vara, s’adresse à la présidence en faisant de la main le signe V (=2) pour demander l’entrée de son compagnon. C’est pour eux le seul moyen d’essayer de coincer ce toro fuyard pour essayer de le piquer réellement ! mais ils devront se contenter de quelques picotazos avec sortie suelto, quand ils arriveront à piquer leur toro !
Et la scène se répétera à chaque toro. Miguel Reta déclarera quelques jours plus tard que le manejo de ses toros se faisait à pieds ou en véhicule (moto ?) et donc qu’ils n’avaient jamais vu un cheval, ce qui expliquerait ces réactions désordonnées. Mais la conclusion unanime des aficionados et des commentateurs est qu’ils étaient mansos perdidos à l’exception du 4 ème qui affrontera le picador avec une certaine caste, encore qu’après un batacazo, il ait fallu aller le piquer dans le terrain du toril !
Après ce gâchis, dans une arène comme Céret où la pique est prioritaire, que pouvaient faire les courageux maestros qui se mettaient devant ces toros ? Ce fut un festival de passes arrachées une par une, le plus souvent en reculant devant la corne agressive, en bougeant énormément : autrement dit, une lidia à l’ancienne comme avec des toros de la fin du 19 ème siècle. Tous cependant firent un effort remarquable, Sanchez Vara se montrant le plus efficace, notamment devant le 4 ème, mais Chacon lidia également très bien ses deux toros et Pacheco, malgré une voltereta, s’engagea bien droit dans ses estocades ce qui traduit son pundonor.
Au final, et malgré les critiques ayant inondé la presse taurine avec cette corrida, ce fut un spectacle passionnant dont il faut retenir le courage et l’engagement sans faille des toreros (y compris les cuadrillas) qui se sont mis face à ces cornes impossibles. A retenir aussi, le mauvais choix du ganadero qui aurait sans doute du suivre la voie traditionnelle et passer en novillada avant de se lancer en corrida. D’ailleurs une novillada lidiée quelques semaines plus tard est plutôt mieux sortie. A sa décharge, retenons que ces toros auraient du être toréés un an auparavant si le Covid n’avait pas frappé et que leur comportement eût été sans doute différent, le sentido et l’esprit défensif augmentant beaucoup avec l’âge. Il faut aussi savoir qu’avant même de lidier cette corrida, Miguel Reta avait commencé une nouvelle sélection et modifié les choix de sementales et de vaches à associer pour l’insémination : attendons donc le résultat dans 3 ans !
Pour ma part, je ne remercierai jamais assez l’ADAC de m’avoir fait vivre une corrida, comme il s’en voyait il y a plus de 100 ans, même si le tercio de piques n’est plus comparable.
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